LaSociété par Actions Simplifiée en droit polonais (PSA) [1]
Le 1er juillet 2021, la Pologne se dotera d’un nouveau type de société de capitaux, déjà bien connue en France et dans d’autres pays européens – la SAS / société par actions simplifiée (en polonais prosta spółka akcyjna, dont l’abréviation est « PSA » et qui se traduit littéralement par « société anonyme simple »). Comme son homologue française, la SAS polonaise aura pour maîtres-mots la flexibilité, la libre cession des actions et l’allègement des formalités. Elle ne manquera toutefois pas de se distinguer par quelques dispositions spécifiques.
1. Constitution – les apports en industrie
Outre les apports en numéraire ou en nature, les actionnaires pourront effectuer des apports en industrie (mettre à disposition de la SAS leur travail, leurs connaissances techniques ou leurs services en contrepartie d’actions). Il convient de noter qu’aucune forme de société polonaise ne permettait jusque-là d’effectuer de tels apports.
Les actions obtenues en contrepartie d’un apport en industrie seront soumises au même régime que celles représentatives d’un apport en numéraire ou en nature, ce qui n’est pas le cas dans la SAS française. De telles actions seront donc librement cessibles (à moins que les actionnaires n’en décident autrement dans les statuts) et pourront être assorties de droits particuliers au même titre que les autres actions.
2. Au capital social est substitué un « capital actionnaire »
Le capital social sera remplacé par un « capital actionnaire » (pol. kapitał akcyjny) d’une valeur d’un zloty au minimum. Ce capital sera alimenté par la libération des actions en numéraire ou en nature. Le montant du capital actionnaire ne figurera pas dans les statuts et sera détaché du nombre ou de la valeur nominale des actions.
Ceci permettra d’une part d’émettre de nouvelles actions (et donc d’augmenter le capital actionnaire) selon une procédure rapide et simplifiée. D’autre part, l’absence de valeur nominale des actions permet aux actions d’industrie de bénéficier du même traitement que celles issues d’un apport en numéraire ou en nature.
3. Liberté pour les actionnaires de se retirer
La SAS permettra également aux actionnaires de sortir facilement de la société. En effet, un investisseur pourra librement et facilement obtenir le remboursement de son capital à condition que :
- le montant du capital actionnaire retiré n’excède pas l’équivalent de 5 % des dettes relevées dans les comptes annuels établis pour l’exercice social précédent. Dans le cas contraire, le retrait fera l’objet d’une procédure plus complexe, similaire à celle de la réduction du capital social d’une SARL,
- sous réserve de l’accord de l’organe exécutif de la société, la restitution des fonds ne conduira pas la société à perdre sa capacité à s’acquitter de ses dettes exigibles durant les 6 prochains mois, et
- en tout état de cause, le capital actionnaire demeure supérieur à 1 zloty.
La relative facilité de sortie du capital pourrait avoir un impact négatif sur la crédibilité de la SAS aux yeux de ses futurs créanciers. C’est la raison pour laquelle la SAS sera assortie de plusieurs dispositions visant à défendre les intérêts ces derniers.
D’une part, la responsabilité civile (voire pénale) des dirigeants de la SAS obéira aux règles applicables aux autres sociétés de capitaux.
D’autre part, la SAS bénéficiera d’un mécanisme d’accumulation d’un fonds de réserve, et ce sans dérogation statutaire possible. Toute SAS sera ainsi tenue de verser annuellement au minimum 8 % de son bénéfice sur un fonds de réserve, jusqu’à ce que celui-ci atteigne un montant égal à 5 % des dettes relevées dans les comptes annuels établis pour l’exercice social précédent.
4. Cession d’actions
Par rapport à la cession de parts sociales dans une SARL, les formalités liées à la cession d’actions d’une SAS ont été réduites au maximum. En effet, la cession d’actions pourra s’opérer par simple e-mail, à condition de préciser l’identité du cessionnaire et du cédant, ainsi que le nombre et le prix des actions cédées. Bien entendu, l’établissement d’un acte dûment écrit et signé par les deux parties ne peut que contribuer à la sécurité de la transaction.
L’identité du nouveau détenteur des actions sera par la suite répertoriée au registre des actionnaires tenu par un notaire ou par une institution financière librement désignée par la société. Il n’est pas à exclure que de tels services soient offerts par les banques parallèlement à la tenue des comptes bancaires de la société.
Le registre des actionnaires ne sera pas public. Il s’agit d’une différence notable par rapport aux SARL dont la liste des associés détenant plus de 10 % du capital social peut être librement consultée par toute personne.
5. Actions de préférence
La flexibilité de la SAS est particulièrement intéressante pour les actionnaires qui voudraient bénéficier d’un statut particulier au sein de la société (investisseur clé, fondateurs, etc.). En effet, les dispositions qui tendaient à limiter la portée des parts de préférence dans les SARL ne sont pas applicables aux SAS. Bien au contraire, les actions de préférence assorties de droits particuliers, notamment en matière de vote, de distribution de dividendes ou de partage du patrimoine de la société lors de sa dissolution seront librement encadrées par les statuts.
Indépendamment de la liberté statutaire, la loi propose aux actionnaires trois catégories d’actions de préférence qui ne peuvent être mises en œuvre dans une SARL, à savoir :
- les actions des fondateurs (ang. « founder’s shares »), permettant de préserver la proportion entre le droit de vote attaché aux actions en question et les autres actions,
- les actions sans droit de vote, privilégiant un investisseur dans la distribution de dividendes tout en le privant de la possibilité de participer activement à la vie de la société,
- les actions avec des prérogatives particulières de nature extrapatrimoniale, conférant au détenteur le droit de nommer et de révoquer les membres des organes de la société.
6. Organes de la SAS
Deux modèles de direction, « dualiste » ou « moniste », pourront être mis en œuvre dans la SAS.
Le premier d’entre eux, déjà connu des SARL polonaises, prévoit un organe exécutif comme organe directorial obligatoire et, facultativement, un organe de contrôle.
Le modèle « moniste » en revanche, fréquemment rencontré dans les systèmes juridiques anglo-saxons, prévoit un seul organe de direction, le conseil des directeurs. Ce dernier réunit les compétences des conseils de gérance et de surveillance prévus par le modèle « dualiste ». Ce modèle vise à donner plus de flexibilité dans l’attribution des fonctions entre les directeurs, qui peuvent être exécutifs ou non-exécutifs, et à faciliter leur coopération dans le cadre d’un seul organe.